
Le gouvernement s’apprête à réformer en profondeur le processus de nomination des Senior Counsel et Senior Attorney à travers le projet de loi « Senior Counsel and Senior Attorney Bill 2025 », récemment annoncé par l’Attorney General, Me Gavin Glover. Jusqu’à présent, ces titres relevaient exclusivement de la prérogative du chef juge, mais la réforme entend bouleverser ce mécanisme historique.
D’après les grandes lignes du projet, les recommandations ne seraient plus adressées directement par le chef juge au Président de la République. Un Recommendation Panel serait créé pour sélectionner et proposer les candidatures. Ce panel regrouperait le chef juge, le Senior Puisne Judge, l’Attorney General, ainsi que les présidents du Bar Council (Mauritius Bar Association) et du Mauritius Law Society Council (MLSC). Le président de la République conserverait toutefois un droit de regard : il pourrait refuser certaines nominations ou demander un réexamen de la liste. L’objectif affiché : rendre le processus plus structuré et transparent.
Cette initiative fait suite à la polémique entourant les dernières nominations de Senior Counsel, lorsque la liste soumise par le judiciaire avait été modifiée par la présidence. Plusieurs nominations sont actuellement contestées devant la Cour suprême dans le cadre d’une Judicial Review.
Le 5 septembre 2025, trois praticiens du droit ont saisi formellement la Cour suprême pour contester la légalité de ces nominations :
Me Jacques Tsang Mang Kin, avocat reconnu pour son engagement dans la profession ;
Me Avinash Renga Sunassee, avocat impliqué dans des causes de justice ;
Me Amanah Ragavoodoo, avouée, remplaçant Me Joy Beeharry, initialement partie à la procédure.
Les plaignants reprochent le communiqué du président de la République du 14 août 2025 de ne faire état d’aucune recommandation officielle de la cheffe juge, Rehana Mungly-Gulbul, comme l’exige la Law Practitioners Act. Selon eux, cette omission compromet la légalité et l’équité de l’ensemble du processus.
Si l’injonction visant à bloquer les nominations a été levée, le gouvernement a jugé nécessaire de clarifier et de structurer le processus. Au sein du judiciaire, les réactions sont partagées : certains craignent que cette réforme n’affaiblisse l’indépendance de la magistrature, tandis que d’autres y voient une tentative d’instaurer un système plus équilibré et transparent.
Interrogé vendredi dernier sur le projet de loi, l’attorney General, Me Gavin Glover a choisi de ne pas faire de commentaires, précisant qu’il ne s’agit pas encore d’un texte finalisé ni officiellement publié.
Alors que le Senior Counsel and Senior Attorney Bill 2025 s’apprête à restructurer un processus historique, le débat sur l’équilibre entre transparence et l’indépendance du judiciaire reste ouvert. L’avenir des nominations honorifiques à Maurice s’annonce sous haute tension, suscitant l’attention de l’ensemble de la profession juridique et du public.