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Fab: Le 21/10/2025 à 17:23 | MAJ à 21/10/2025 à 20:56
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Publié : Le 21/10/2025 à 17:23 | MAJ à 21/10/2025 à 20:56
Par : Manisha Jooty

Nigel Farage a affirmé que « la Chine négocie un bail sur Peros Banhos », qu’elle installerait des « caméras Huawei » et qu’un « marché secret » aurait été conclu avec Maurice.

C’est ce qu’il a déclaré lors de la 3ᵉ lecture du projet de loi du Diego Garcia Military Base and British Indian Ocean Territory Bill, lors de son intervention à la Chambre des communes.

Or, aucune preuve, aucun document officiel, aucun diplomate ne corrobore de telles affirmations.

Le traité lui-même contient une annexe de sécurité explicite : “Aucune présence militaire étrangère, autre que britannique, américaine ou mauricienne, n’est autorisée sans décision conjointe du Royaume-Uni et de l’île Maurice.”

Autrement dit : même si Maurice en avait la volonté — ce qui n’est pas démontré — elle ne pourrait pas inviter la Chine seule sans l’accord du Royaume-Uni.

La soi-disant « base chinoise » est donc une fiction totale, utile à nourrir un récit alarmiste du tribun populiste.

Ce qu’insinue Nigel Farage… « La Chine a construit une ville intelligente juste à côté de Port-Louis.

Des caméras de surveillance Huawei Safe City sont installées partout sur l’île, et maintenant la Chine négocie un bail sur l’île de Peros Banhos, située près de Diego Garcia.

Jonathan Powell est-il en train de nous vendre à la Chine ? Que diront les Américains lorsqu’ils se rendront compte que leur base militaire n’est plus sécurisée ? »

Ces déclarations interviennent alors que le projet de loi sur les Chagos revient devant la Chambre des communes pour ses dernières étapes.

Les propos de M. Farage constituent la dernière réaction d’indignation face aux projets du gouvernement de restituer les îles Chagos, puis de payer pour louer à nouveau la base militaire américano-britannique de Diego Garcia.

Un accord conforme au droit international.

Le 22 mai 2025, le Chagos Archipelago, incluant Diego Garcia, fait l’objet d’un traité entre le United Kingdom et la Republic of Mauritius.

Ce traité reconnaît la pleine souveraineté de Maurice sur tout l’archipel, tandis que le Royaume-Uni se voit autorisé à exercer les droits nécessaires au fonctionnement de la base américano-britannique de Diego Garcia (pour un minimum de 99 ans).

Le texte précise aussi un partenariat économique, des dispositions environnementales et un mécanisme de gouvernance bilatérale.

L’accord répond aux décisions de la International Court of Justice et de l’United Nations General Assembly, qui estimaient que la décolonisation de Maurice n’avait pas été menée légalement.

Les “absurdités” factuelles relevées

Farage évoque la « proximité » de Peros Banhos à Diego Garcia.

En réalité, la distance est de l’ordre de 200–210 km, ce qui n’est ni contigu ni adjacent.

Il avance un “accord secret avec Pékin” : aucun document officiel (UK, Maurice ou US) ne mentionne un tel bail.

Il évoque un “coût de £50 milliards” pour le contribuable britannique. Le montant officiel du partenariat est de ~£3,4 milliards sur 99 ans (soit ~£101 millions/an) selon le traité.

Il affirme que l’accord “ferme la porte à l’Occident” et “ouvre la voie à Pékin” : au contraire, l’un des objectifs affichés est la conservation de la base occidentale et la coopération dans l’océan Indien.

Contrairement aux insinuations de Farage, la République de Maurice est un partenaire stratégique fiable de l’Occident :

elle coopère activement avec les États-Unis, la France et l’Inde pour la sécurité maritime dans l’océan Indien ;

elle participe à la lutte contre la piraterie et à la surveillance des routes maritimes.

Il ne s’agit pas d’un “cheval de Troie chinois”, mais d’une mise en œuvre moderne d’un règlement diplomatique.

Les propos de Farage reposent sur une pure fabrication politique, visant à accuser Maurice de trahison pour des gains électoraux internes.

Farage évoque un “coût de £50 milliards pour le contribuable britannique”. Or : le montant officiel est d’environ £3,4 milliards sur 99 ans.

Loin d’un “cadeau” à Maurice ou d’un renoncement militaire, il s’agit d’une mise en conformité morale et juridique du Royaume-Uni avec le droit international.

En réalité, la sortie de Farage n’a rien d’un débat éclairé sur la défense : c’est une manœuvre politicienne destinée à raviver le nationalisme post-Brexit.

En agitant l’épouvantail chinois, il cherche à diaboliser un accord qui répare une injustice historique et renforce la présence occidentale dans l’océan Indien.

Son discours, truffé d’exagérations et de chiffres imaginaires, relève de la malhonnêteté intellectuelle.

La théorie de la “base chinoise” inventée par Farage est un miroir de son style : simpliste, alarmiste, sans fondement.

L’accord est un jalon de diplomatie responsable, non un scandale imminent.

Accuser un traité clair, publié et débattu de “trahison” ou “d’abandon” est une pure posture.

C’est pourquoi il convient de dénoncer cette manipulation comme telle.