Un an après l’arrivée de l’Alliance du Changement au pouvoir, l’heure est au premier bilan économique. Plusieurs mesures ont marqué ces douze derniers mois : baisse du coût de la vie, gel des investissements de la Mauritius Investment Corporation (MIC), refonte du système de retraite… Autant de décisions parfois impopulaires, mais présentées comme indispensables pour remettre de l’ordre dans les finances publiques et restaurer la confiance dans les institutions.
Les économistes saluent, dans l’ensemble, une orientation « courageuse », tout en soulignant la fragilité de cette relance encore en construction.
Dès son installation, la coalition a affirmé avoir trouvé des finances publiques dans un état préoccupant, évoquant souvent « une caisse vide ». Malgré cela, le gouvernement a maintenu le paiement du 14ᵉ mois, mais uniquement pour les employés du public et du privé gagnant jusqu’à Rs 50 000 par mois.
L’affaire Mauritius Investment Corporation (MIC) a aussi été révélée au grand jour, au début même de la prise du pouvoir du gouvernement. Lors de sa première conférence de presse en tant que gouverneur de la Banque de Maurice, Rama Sithanen est sur ce dossier. Créée pendant la pandémie pour soutenir les entreprises, la société est aujourd’hui impliquée dans un scandale financier majeur. Le gouvernement a décidé de geler tous les nouveaux investissements de la MIC, qui gère plus de Rs 56 milliards répartis dans une soixantaine d’entreprises.
Le 10 décembre 2024, le Premier ministre, le Dr Navin Ramgoolam, a présenté son rapport sur l’état de l’économie.
Selon lui, la croissance de 2023 n’était que de 5,6 %, bien en dessous des 7 % annoncés par le précédent gouvernement. Les estimations pour 2024 ont été révisées à 5,1 %.
L’ancien ministre des Finances, Renganaden Padayachy, conteste cette analyse, affirmant que l’économie connaissait alors un véritable « boom ».
En avril 2025, le Fonds monétaire international (FMI) a salué les efforts du gouvernement pour renforcer la gestion financière et accroître la transparence.
Sa représentante, Mariana Colacelli, a toutefois recommandé de réduire la participation de la Banque de Maurice dans la MIC, afin de garantir son indépendance et la crédibilité de la politique monétaire.
Sur le plan économique, la première année de l’Alliance du Changement a également été mouvementée au niveau de la Banque de Maurice. Le Second Deputy Governor, Gérard Sanspeur, a démissionné, suivi du gouverneur Rama Sithanen. Après plusieurs dénonciations internes, la direction a été confiée à la Dr Priscilla Muthoora Thakoor.
Cette dernière a promis de privilégier la stabilité, la transparence et l’indépendance de l’institution, lors d’un entretien exclusif à Top FM.
Le premier anniversaire de l’Alliance du Changement a aussi coïncidé avec la présentation du Budget 2025, marqué par une réforme majeure des retraites.
Le Premier ministre, le Dr Navin Ramgoolam, a estimé que le système actuel de pension universelle, accordée à partir de 60 ans, n’est plus soutenable à long terme.
Pour atténuer la hausse du coût de la vie, le gouvernement a mis en place un Price Stabilisation Fund, destiné à réguler les prix de cinq produits de base.
En décembre 2024, une baisse de Rs 5 sur les carburants a été annoncée, ramenant le prix de l’essence à Rs 61,20 et celui du diesel à Rs 58,95.
Presqu’un an plus tard, le Petroleum Pricing Committee a proposé une nouvelle réduction de l’essence à Rs 58,45, le diesel demeurant inchangé.
Comment les économistes évaluent-ils la première année de l’Alliance du Changement ?
Selon le Dr Takesh Luckoo, la philosophie économique du pays a profondément changé : l’ancien régime donnait beaucoup, mais au prix d’une inflation galopante. Le gouvernement actuel cherche à stabiliser sans céder à la facilité.
Le Dr Takesh Luckoo évoque également la création du Price Stabilisation Fund, la baisse du prix des carburants et la mise en place d’indicateurs de performance pour renforcer la transparence.
L’économiste Manisha Dookony reconnaît, elle aussi, des avancées, notamment dans la stabilisation de la roupie et l’accès au logement grâce au programme ‘Rent-to-Own’.
Elle salue également les premières mesures concernant la Basic Retirement Pension (BRP).
Toutefois, elle souligne que certaines réformes promises restent en attente d’application, ce qui entretient « une incertitude pour les investisseurs ».
Alors que Takesh Luckoo rappelle qu’un an, c’est court pour transformer les promesses en résultats concrets. Et le deuxième budget pourrait encore apporter des mesures ciblées pour soulager les ménages, notamment sur les médicaments ou l’accès à Internet gratuit.
Un an après, le cap est posé. Mais pour les économistes, l’Alliance du Changement doit désormais passer du redressement à la relance.