Coup d’envoi cette semaine de la production de vaccins made in France. C’est à Saint-Rémy-sur-Avre (Eure-et-Loir), dans l’usine du sous-traitant Delpharm, partenaire de Pfizer-BioNTech, que les premières doses devraient être fabriquées.
L’entreprise française, qui a recruté une cinquantaine de personnes sur son site normand, ne produira pas la substance active du vaccin mais elle sera chargée de son conditionnement. Elle a investi 20 millions d’euros en équipement dont la moitié financée par l’État, selon le JDD . «Notre client nous envoie le vaccin, nous sommes chargés du remplissage dans des flacons stériles, détaillait cet hiver au Figaro Stéphane Lepeu, patron de Delpharm qui compte notamment 12 usines en France. Le vaccin arrive à – 70 °C et il nous faut le renvoyer à cette température, c’est la principale contrainte.» A Saint-Rémy-sur-Avre, «plusieurs dizaines de millions de doses» devraient être conditionnées d’ici à la fin de l’année.
Comme la plupart de ses concurrents, Delpharm, l’un des leaders mondiaux de la sous-traitance pharmaceutique, a dû acheter des millions de flacons stériles et de bouchons, produits qui menaçaient déjà de manquer à l’automne tant la demande mondiale était importante. Le vaccin à ARN messager de Pfizer-BioNTech devant être stocké à très basse température (comme celui de Moderna), il a dû aussi passer commande d’énormes volumes de neige carbonique et de supercongélateurs.
D’ici à la fin du mois, ce sera au tour du suédois Recipharm, l’un des cinq plus grands acteurs mondiaux du secteur, de démarrer la production. Il rejoint les autres sous-traitants de Moderna, parmi lesquels le géant suisse Lonza, qui fabrique la substance active, l’américain Catalent et l’espagnol Rovi. «Nous nous sommes, en urgence, mis à disposition de Moderna pour remplir cette mission, expliquait au Figaro à l’automne Jean-François Hilaire, vice-président exécutif de Recipharm. Notre usine, qui fabrique des anesthésiques, fonctionnera désormais 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.» Une soixantaine de personnes ont été recrutées sur son site d’Indre-et-Loire pour ce contrat. Deux millions d’euros ont été consacrés à l’achat de supercongélateurs et de conteneurs.
«La France est sur le point de basculer dans une production massive de vaccins», s’est félicité Thierry Breton, Commissaire européen en charge de la task force Vaccins, en visite ce dimanche dans l’usine de l’allemand CordenPharma à Chenôve (Côte d’Or), près de Dijon, qui fournit à Moderna les nanolipides de son vaccin.
En France, Sanofi prévoit aussi de mobiliser son site de Marcy-l’Étoile, près de Lyon, qui participera à la formulation et au remplissage des flacons du vaccin de Johnson & Johnson à un rythme d’environ 12 millions de doses par mois. La production de son propre vaccin devrait ensuite prendre le relais au deuxième semestre, en cas de succès de ses essais cliniques. À ce stade, sept usines en France devraient participer cette année à la production de vaccins Covid et contribuer à la fabrication de 250 millions de doses.
Avec cette montée en puissance des capacités de production, l’enjeu reste celui de l’indépendance sanitaire de la France. « C’est tout notre tissu pharmaceutique qui est à reconstruire », constate Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l’industrie, dans le JDD, qui regrette « trente ans de désindustrialisation dans le secteur de la pharmacie ». Outre le conditionnement des vaccins, l’Hexagone devra aussi être en mesure de maîtriser la production de la substance active des vaccins à ARN messager. Une technologie qui, outre le Covid, ouvre la voie au traitement de nombreuses maladies parmi lesquelles le cancer. Sanofi, engagé avec la biotech américaine Translate Bio dans un projet de vaccin Covid à base d’ARN messager, a fait de cette plateforme l’une de ses priorités en matière de R&D.
Source : Le Figaro