
À La Réunion, les drogues synthétiques ne sont plus une menace invisible. En 2025, elles s’imposent dans les rues, dans les quartiers… et dans les urgences.
Des substances puissantes, bon marché, et souvent mortelles. Derrière les noms de code comme « B13 », « Dou » ou encore « protonitazène », se cache un fléau social, sanitaire… et criminel.
Depuis plusieurs années, La Réunion est confrontée à l’essor fulgurant des drogues de synthèse. Fabriquées en laboratoire, ces substances — MDMA, cathinones, cannabinoïdes artificiels — sont plus puissantes, plus addictives, et souvent vendues sur Internet ou via des réseaux discrets. Elles ciblent surtout les jeunes, les précaires… et les désespérés.
Depuis 2023, les produits comme le « Dou », le « B13 » ou le tristement célèbre protonitazène font des ravages. Ce dernier, un opioïde de synthèse extrêmement toxique, a déjà causé 3 décès à La Réunion, selon l’Agence Régionale de Santé (ARS) Réunion et Police et Gendarmerie de La Réunion.
Les services de santé tirent la sonnette d’alarme. Les cas d’intoxications graves se multiplient. Les urgences sont saturées. Et les équipes de terrain évoquent un changement profond des profils d’usagers : plus jeunes, plus isolés, et de plus en plus accros, selon la presse Réunionnaise La 1ere.
Côté répression, les forces de l’ordre ont démantelé en 2024 un réseau de trafic de drogues synthétiques opérant entre l’île, la métropole et les Pays-Bas. Bilan : 900 000 euros en liquide saisis, des colis de drogue pure interceptés, et cinq suspects en attente de jugement, risquant jusqu’à 20 ans de prison. L’aréroport Roland-Garros est désormais sous haute surveillance. En juin 2025, une opération de grande ampleur a mobilisé une centaine de policiers et douaniers. Objectif : détecter les « mules », ces personnes — souvent jeunes, sous emprise ou endettées — qui transportent la drogue dans leurs valises… ou dans leur corps selon la presse réunionnaise.
Entre 2021 et 2024, les saisies de cocaïne ont été multipliées par sept. La résine de zamal est passée de 41 kg à près de 500 kg. Le crack, encore inexistant il y a deux ans, circule désormais dans les rues. Quant aux mules, leur nombre a triplé : 8 interpellations en 2021 contre 24 en 2024 selon la Police et Gendarmerie de La Réunion.
La Réunion devient peu à peu une plaque tournante du trafic international, entre Madagascar, Maurice, l’Afrique de l’Est et l’Hexagone. Face à ce fléau, l’ARS a renforcé les dispositifs d’aide, notamment via les CSAPA — Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie. Rappelons que la consommation ou la détention de stupéfiants est passible d’une amende de 200 euros, pouvant aller jusqu’à un an de prison et 3 750 euros d’amende selon la loi réunionnaise. Le trafic, même sans but lucratif, est un crime puni jusqu’à dix ans d’emprisonnement, avec des peines plus lourdes si des mineurs sont impliqués ou si l’infraction a lieu près d’un établissement scolaire.