
À Maurice, être journaliste semble de plus en plus relever du parcours du combattant.
Les intimidations, les arrestations et les menaces ne sont plus des faits isolés : elles dessinent un schéma inquiétant.
Depuis quelques années, le climat s’est durci au point que certains professionnels de l’information se demandent s’ils ne figurent pas, littéralement, sur une liste noire.
La dernière interpellation d’un journaliste fait couler beaucoup d’encre. Des parlementaires, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition, expriment leur indignation.
Narain Jasodanand est attendu ce matin au Central Crime Investigation Unit.
Serait-il une victime d’un deal papa-piti du clan Sithanen?
Un épisode que le public attribue au régime de l’Alliance Lepep.
Les interpellations de journalistes… ce n’est pas une première à Maurice.
C’est un pouvoir qui dérange, avec une presse qui paie le prix.
En 2017, trois journalistes de L’Express avaient été interpellés pour avoir osé révéler un scandale sensible.
Cinq ans plus tard, trois autres, d’un autre groupe de presse, ont été pris pour cible, arrêtés et harcelés en ligne dans un climat d’hostilité grandissante entre médias et autorités.
Certains ont même perdu leur emploi à l’époque de l’ancien régime.
Il y a deux ans déjà, trois journalistes ainsi que le directeur d’une radio privée avaient consigné une mesure préventive auprès de la police, craignant d’être la cible d’une « hit-list ».
Qui a donné le feu vert pour autoriser la police, et surtout la Cybercrime Unit, à interpeller Narain Jasodanand ?
Selon le Commissaire de police, c’est après plusieurs appels passés au journaliste concernant un article publié le 28 août que les officiers ont procédé à une perquisition à son domicile.
Narain Jasodanand devrait se présenter ce matin aux Casernes centrales.
Nous l’avons sollicité…il insiste que les officiers de la cyber crime unit lui ont dit que c’est suite à une plainte du fils du gouverneur de la banque de Maurice, Tevin Sithanen, qu’ il a été interpellé.
« Serait-ce un jeu ? Pas moi sa li sa… »
Jean-Luc Mootoosamy, lui, est catégorique : la police doit inspirer confiance.
Le gouvernement actuel a une responsabilité : ne pas commettre les mêmes erreurs que l’ancien régime.
Le journalisme n’est pas un crime.
Pourtant, à Maurice, il est de plus en plus traité comme tel. Chaque arrestation, chaque menace, chaque pression judiciaire est un pas de plus vers l’érosion des libertés.
Le gouvernement a une responsabilité claire : garantir la sécurité et l’indépendance des journalistes.
À défaut, il se rend complice d’un climat qui muselle la presse et appauvrit le débat public.