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Naresh: Le 27/02/2021 à 11:36 | MAJ à 10/07/2024 à 19:57
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Publié : Le 27/02/2021 à 11:36 | MAJ à 10/07/2024 à 19:57
Par : Naresh

5,4 millions de Salvadoriens sont appelés aux urnes ce dimanche 28 février pour des élections municipales et législatives. Un scrutin en forme de référendum sur la politique menée par le président Nayib Bukele depuis deux ans.

Blouson de cuir, casquette de base-ball : Nayib Bukele détonne dans le paysage politique salvadorien et c’est ce qui plaît. Ce tout jeune président – 37 ans au moment de son élections en février 2019 – avait fait campagne sur la rénovation de la vie politique salvadorienne et la critique des deux partis traditionnels qui se partagent le pouvoir depuis la fin de la guerre civile : l’ARENA, à droite, et le Front Farabundo Martí de libération nationale (FMLN), à gauche, le parti de l’ancienne guérilla qui a signé des accords de paix avec l’armée en 1992. Le fondateur du parti Nuevas Ideas (Nouvelles Idées) se présente comme un outsider. Il dénonce la corruption, l’inaction de classe politique et porte les espoirs d’un changement dans ce pays très pauvre d’Amérique centrale, régulièrement touché par les tempêtes tropicales et gangréné par les maras, des gangs ultraviolents.

Le président avait justement promis de s’attaquer à l’insécurité. Deux ans plus tard, le Salvador est toujours l’un des pays les plus violents au monde. Mais les chiffres des homicides sont au plus bas depuis la fin de la guerre civile. Peut-être est-ce lié à la crise sanitaire, ou à une trêve négociée avec les gangs, comme le démontre une enquête du très sérieux journal El Faro. Nayib Bukele et ses ministres nient tout accord avec ces groupes criminels. Autre grand thème de campagne de Nayib Bukele : la lutte contre la corruption. Depuis 2019, les enquêtes et les arrestations se multiplient. Elles visent surtout les deux partis traditionnels, majoritaires au Parlement.

 

La séparation des pouvoirs en question

Récupérer cette institution lors des législatives simplifierait la tâche de Nayib Bukele, car ses relations avec les parlementaires sont notoirement tendues. Depuis deux ans, c’est le bras de fer. Le Parlement a notamment refusé de valider le prêt international qui doit financer son programme phare de lutte contre le crime organisé. Pour faire pression, Nayib Bukele a fait irruption au Parlement avec soldats et policiers anti-émeutes le 9 février 2020.

Il y a quelques jours, les députés ont demandé qu’une Commission parlementaire déclare « l’incapacité mentale » du président. Obtenir une majorité confortable au Parlement permettrait à Nayib Bukele de faire avancer ses réformes plus vite, notamment une révision de la Constitution. Mais cela inquiète ses détracteurs qui dénoncent une concentration des pouvoirs dans les mains d’un homme déjà accusé de dérives autoritaires.

C’est un scénario où il y aura probablement une concentration des pouvoirs dans les mains d’un seul parti politique. Depuis 1992,jusqu’à présent, on n’avait jamais connu un scénario pareil. Le pouvoir était distribué de façon équitable. L’exercice de contrôle des pouvoirs et contre pouvoirs fonctionnait. Mais si l’assemblée législative est dominée à la majorité simple ou qualifiée par des députés proches du président Bukele, celui-ci aura la possibilité de nommer des magistrats de la Cour Suprême. Et puis c’est l’assemblée nationale qui doit à la fin de l’année nommer le procureur général de la République. Et en raison du type de comportement qu’a eu le président au cours de ces presque deux années de gouvernement, souvent très autoritaire et pas dans la conciliation, s’il obtient la majorité à l’assemblée, il pourra abroger, approuver ou réformer des lois à sa convenance.

Les syndicats, les organisations de défense des droits humains et de l’environnement, relèvent régulièrement des abus de pouvoir. Nayib Bukele est un président omniprésent, qui n’hésite pas à gouverner par tweets. En mars dernier, c’est à travers un message sur ce réseau social qu’il avait donné l’ordre aux militaires d’arrêter toute personne ne respectant pas le confinement.

Éclatement du paysage politique ?

Le chef de l’État salvadorien a de mauvaises relations avec la presse. Il est aussi accusé de népotisme. Depuis son élection, Nayib Bukele a placé tout un cercle d’amis, de proches, voire sa propre famille aux postes de pouvoir. Une enquête journalistique montre notamment l’influence de ses frères sur la présidence. Au cours de la campagne pour ces élections législatives et municipales, il a été accusé d’attiser les tensions en dénigrant constamment les partis traditionnels et en critiquant les accords de paix de 1992. Le président est aussi critiqué pour avoir utilisé de manière indue les fonds publics pour distribuer, en pleine campagne électorale, des colis alimentaires sous couvert d’aide pour faire face à la pandémie.

Mais aux yeux de la population, la sécurité semble s’améliorer, la corruption est enfin combattue, et cela semble passer au-dessus du reste. Le parti du président, Nuevas Ideas, est donné largement gagnant dimanche dans tous les sondages. Il pourrait disposer d’une majorité absolue au sein du Parlement unicaméral, et remporter plusieurs municipalités importantes. Après 30 ans de règne sans partage des deux partis ARENA et FMLN, c’est donc un bouleversement du paysage politique salvadorien qui est attendu dimanche 28 février.

Source : rfi.fr

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